13/08/2018 par Hicham HMICHE
Depuis la révolution industrielle, notre rapport au travail n'a eu de cesse d'évoluer au fil des générations. Avec l'avènement de la robotique, il est même devenu envisageable de diviser notre temps de travail par deux dans certains secteurs. Notre époque serait-elle enfin propice à l'apparition des congés illimités ?
Même si le théoricien américain Peter Drucker a été le tout premier auteur à énoncer les principes du "Management Par les Objectifs" (MPO), il nous aura fallu attendre le début du XXIè siècle pour observer la mise en application
de ces méthodes managériales à grande échelle.
En théorie, les congés illimités fonctionnent de pair avec la culture du résultat qui vient à remplacer celle des horaires. C'est en tout cas ce que propose le géant Netflix à ses salariés depuis 2009. En effet, le géant
américain du streaming permet à ses salariés de prendre des congés quand ils veulent, sans aucune limite. Cependant, chaque salarié doit remplir un certain nombre d'objectifs pour assurer sa productivité, selon ses propres
modalités.
Si le concept de congés illimités séduit autant les entreprises de la Silicon Valley, c'est parce qu'il parle à une masse salariale essentiellement composée de jeunes qui abordent le travail autrement que leurs aînés. Dans un monde de plus en plus dématérialisé, le principe du présentéisme est jugé comme étant trop handicapant pour une partie des salariés qui souhaitent pouvoir travailler à partir de n'importe quel espace, sans avoir à se rendre dans les locaux de leur entreprise. Cette approche des congés illimités permet aussi à la Silicon Valley de conserver son rôle de novateur dans les structures managériales, tout en renforçant son imagerie "cool".
Toujours férues des nouveautés en matière de management, les startups françaises essayent de se maintenir à la pointe de l’innovation. C'est donc en toute logique qu'elles commencent à s'inspirer de géants américains, à l'instar
du groupe Virgin qui a adopté en 2014 la "unlimited vacation policy" sous l'impulsion de Richard Branson.
On compte déjà quelques startups parisiennes qui appliquent le principe des congés illimités.
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Lorsqu'un salarié se rend sur son lieu de travail, rien ne garantit que ce dernier fera preuve de productivité tout au long de sa journée de travail. Et pour cause, plusieurs études démontrent que la productivité d'un employé
n'est pas directement corrélée à son temps de présence au bureau. Ce n'est donc pas étonnant de découvrir sur une étude publiée par Horoquartz que 75% des salariés sondés pensent qu'une plus grande souplesse dans l'organisation
du temps de travail permettrait d'augmenter considérablement leur productivité.
Parallèlement, plusieurs secteurs professionnels se plaignent de ne pas pouvoir attirer de talents pour ensuite les retenir dans leur entreprise. Là aussi, le concept de congés illimités pourrait devenir un argument d'embauche
majeur pour les entreprises qui souhaitent séduire de nouveaux cadres performants, tout en leur offrant un cadre de travail plus serein.
Appelés "Millennials" aux États-Unis, ce terme sert à regrouper l'ensemble des jeunes nés entre 1980 et 2000 en Occident. Les sociologues considèrent que cette génération de jeunes est parvenue à se forger ses propres traits comportementaux, qui impliquent, entre autres, un certain rejet du monde du travail. En effet, les acteurs de la "Génération Y" ne considèrent plus le revenu comme principale source d'épanouissement professionnel et tendent à rechercher de nouvelles expériences dans la vie active. Ainsi, la réponse des congés illimités semblent être particulièrement bien adaptée pour endiguer le phénomène des "turn-over".
Sur le papier, les congés illimités ont de quoi séduire aussi bien les employés que les employeurs. Cependant, la légalité de ce concept alimente de nombreux débats en France. En effet, le Code du travail est le principal
référent des conditions de travail en France. Son rôle est de principalement défendre les employés tout en offrant un cadre juridique viable à l'emploi en France. À l'heure actuelle, le Code du travail ne dispose pas d'assez
d'outils pour garantir la transparence des entreprises qui opteront pour le concept des congés illimités.
De plus, le Code du travail ne permet la différence de traitement entre les employés que dans certains contextes bien précis. Enfin, la méthode du "Management Par les Objectifs" nécessite de pouvoir vérifier si les managers
fixent des objectifs réalistes ou non pour les salariés afin de prévenir tout abus potentiel de ce système.
Toujours pour rester dans les inconvénients des congés illimités, on pourrait citer le fait que ce système ne peut s'appliquer à certains secteurs, comme notamment ceux de la Santé ou de l'Industrie où la présence des salariés est requise à tout moment. Il est aussi inenvisageable d'appliquer ce système à des secteurs qui dépendent de la continuité du service pour fonctionner. Les salariés soumis au 35h ne pourraient pas non plus en bénéficier. À ce titre, le concept des congés illimités pourrait bien accentuer certaines inégalités si son application ne fait pas l'objet d'études poussées.
Le principe des congés illimités est en phase de devenir un rêve palpable pour certains salariés dans le monde. Cependant, pour que le rêve ne se transforme pas en cauchemar, il faut avant tout amorcer un changement structurel,
aussi bien au niveau des institutions juridiques qu'au niveau des mentalités.
Dans de nombreux secteurs d'activité au XXème siècle, le travail a été perçu et vécu comme un phénomène aliénant. Il est donc devenu urgent pour nous de le percevoir autrement que comme une corvée, et ce, afin de
réduire les burn-outs de plus en plus présents dans le monde occidental.
À l'heure actuelle, le droit français défend le principe de l'égalité de traitement des salariés, ce qui constitue la première entrave à une application généralisée des congés illimités. Mais il y a fort à parier que nous
assisterons bientôt à une réforme du travail, pour peu que ça aille dans le sens de la protection des salariés, en leur ouvrant de nouveaux horizons pour leur donner goût au travail accompli quotidiennement.