31/10/2018 par Hicham HMICHE
Les chiffres de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) indiquent que la différence des salaires hommes femmes se situe autour de 18,6 %. Environ la moitié de cet écart semble inexpliqué suggérant que ceci relève de la discrimination pure et simple. Ces chiffres, édités par la Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), ont récemment amené la ministre du Travail à prendre des mesures. Cette dernière souhaite sanctionner les entreprises qui ne font pas l’effort d’essayer de résorber cet écart. Le texte de loi indique que si cet écart n’est pas réduit d’ici trois ans, l’entreprise en question peut se voir imposer une amende pouvant atteindre 1 % de sa masse salariale.
Alors qu’en 2017 la différence salariale hommes femmes chez les cadres en fonction de leur sexe avoisinait 21 %, celle-ci est réduite à 18 % en 2018. D’après l’association pour l’emploi des cadres (Apec), ces écarts de rémunération s’accroissent avec l’âge après la période charnière située entre 30 et 40 ans. C’est à ce moment que les cadres prennent des responsabilités administratives et hiérarchiques dans une dynamique qui se révèle défavorable aux femmes. En effet, la proportion d’hommes occupant des fonctions de direction triple entre 35 et 44 ans. En parallèle, la proportion de femmes suivant une évolution de carrière semblable double à peine. La maternité ou le travail à temps partiel plus répandu chez les femmes ne semblent qu’expliquer partiellement le phénomène.
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On dénombre 31,3 % de femmes titulaires d’un diplôme supérieur à bac + 3 contre 26,4 % d’hommes, illustrant que celles-ci sont plus performantes dans leur scolarité. Toutefois, la parité dans l’accession aux postes de cadres lors de l’entrée sur le marché du travail n'a été atteinte qu’en 2013. Cette différence salariale hommes femmes dès le premier emploi persistait encore en 2016 avec 28 % d’écart chez les jeunes diplômés de Sciences Po.
Par ailleurs, les inégalités de salaire hommes femmes s’expliquent mécaniquement par certains facteurs. Les femmes travaillent en moyenne moins longtemps que les hommes impliquant une différence de revenus. En effet, selon l’Insee, 26,4 % des femmes, soit plus d’une femme sur 4, étaient salariées à temps partiel en 2014 contre 5,5 % des hommes. Ces chiffres sont à mettre en relation avec le fait que huit fois plus de mères travaillent à temps partiel et que la moitié d’entre elles déclarent faire ce choix pour s’occuper des enfants.
Les femmes occupent plus de 70 % des postes ayant les rémunérations les plus basses et leur proportion continue d’augmenter dans les métiers non qualifiés ayant pour conséquence une partie des inégalités de salaire hommes femmes. De plus, 88 % des femmes travaillent dans le secteur tertiaire, où le revenu moyen est le plus bas, contre 64 % d’hommes. À ceci s’ajoute une majorité de femmes (environ 60%) employées en CDD en France.
L’ensemble des facteurs identifiés ne suffisent pas à expliquer les inégalités de salaire hommes femmes comme l’indique le rapport de la Dares relayé par l’observatoire des inégalités. Les différences de temps de travail, de contrats ou de niveaux de compétences n’expliquent pas l’écart de salaire résiduel avoisinant les 9 %. Ce dernier semble relever de la pure discrimination.
Fin 2017, l'Apec et l’ANDRH (Association nationale des DRH) publiaient une enquête conjointe démontrant que la différence salariale hommes femmes chez les cadres est indépendante du taux de féminisation du secteur concerné. En effet, dans le domaine des ressources humaines, 80 % des fonctions cadres sont occupées par des femmes. Ces dernières sont toutefois beaucoup moins rémunérées que leurs homologues masculins. Ces inégalités de salaire hommes femmes atteignent 12 % du salaire médian dans les emplois de développement, 15 % dans les fonctions administratives et jusqu’à 20 % pour les postes de direction.
La proportion de femmes aux fonctions de direction dans le secteur des ressources humaines est d’environ 60 %. À titre d’exemple, dans un autre secteur moins féminisé tel que la production industrielle (15 % de femmes y occupent des emplois cadres), la différence salariale hommes femmes aux fonctions de direction est réduite à 9 %. Ici encore, ces inégalités de salaire hommes femmes sont corrélées avec l’âge et ont tendance à s’accentuer en seconde partie de carrière.
Le coût de la différence salariale hommes femmes pour les entreprises françaises s’élèverait à 62 milliards d’euros par an. La fondation Concorde, un think-tank indépendant, indique que la disparition des inégalités de salaire hommes femmes engendrerait des effets bénéfiques importants sur l’économie nationale. L’impact sur les recettes de l’impôt sur le revenu et des cotisations sociales et patronales générerait un gain de 33,7 milliards d’euros. À ceci s’ajouteraient les effets sur l’épargne (6,16 milliards) et la consommation (21,98 milliards). Ces estimations ont de quoi séduire l’état puisque les recettes engendrées s’élèveraient à 168,74 milliards d’euros à l’échelle d’un quinquennat.
Malgré ces bénéfices potentiels pour le budget de l’État, la situation évolue particulièrement lentement. Un rapport du forum économique mondial (FEM) montre que cet objectif pourrait être atteint dans 170 ans, en 2186. Le FEM s’est appuyé sur les indicateurs que représentent les opportunités économiques, l’éducation, la santé et l’émancipation politique. Les potentialités de réduction des inégalités ont ainsi été évaluées dans les divers secteurs économiques incluant le travail. L’élaboration et l’application de nouvelles lois ne semblent pas accélérer cette évolution puisque déjà trois lois en faveur de l’égalité homme-femme ont été promulguées en France depuis 2006.